mercredi 6 mars 2013

Poème "Le petit Je(u)"


Ce poème Le petit Je(u) a été écrit d’après la série photographique Les dormeurs de Marie-Christine Schrijen qui fonctionne comme un hommage indirect aux quatre membres des « Phrères simplistes »,  annonciateurs du Grand Jeu dont l’activité onirique a toujours été la base de la création littéraire. Rêve dans le rêve, il a pour ambition de creuser la notion de transposition.


Le Petit Je(u) 

                      
                                  en hommage à Roger Caillois


René Daumal





Visage impénétrable
Mystère des fragments de rêve
L’invincible sommeil frappe
Celui qui rêve
Parti dans des voies intimes
Il transcrit en sueur
La litanie des désirs enfouis

Sur la place centrale
D’une ville provinciale
Un monument exerce
Son irrépressible attention
Aux mornes souvenirs
D’une guerre dite grande
Des hommes petits
Ont dressé un cénotaphe

Les yeux clos
Traduisent la pose
De celui qui meurt
De ne pas mourir
L’essence d’un instant
Le temps aboli
Ne restait alors
Qu’à écrire enfin
Le mot toujours
A l’envers d’un parchemin
Survivant d’une époque
Pleine d’ombres sinueuses


Roger Gilbert-Lecomte




Visage recomposé
D’une matière nouvelle
En ces temps lointains
N’existaient pas encore
Les divins pixels
Ici des mousses natives
Hypothèquent notre avenir

Sur la place excentrée
D’une ville capitale
Un monument exerce
Son irrépressible attention
Aux mornes souvenirs
D’une guerre dite grande
Des hommes petits
Ont dressé un mémorial

Des anges gangsters
Passent en vrombissant
Mystère des synthèses
Avant leur inversion codée
En des docks étranges
La lune apparaît
En ses quartiers mythologiques
Froide et absolue
Comme une vodka céleste
Prohibition du désir
Port des amnésiques
Voici la fin du voyage


Roger Vaillant




Visage explosé
Au nez meurtri
D’une puissance certaine
Il abolit la frontière
Entre rêve et réalité
Détours sans pareil
D’une aube à écrire

Sur la place annexe
D’une ville régionale
Un monument exerce
Son irrépressible attention
Aux mornes souvenirs
D’une guerre dite grande
Des hommes petits
Ont dressé un mémorial

Sournoises lueurs
Du monde d’avant
La puissance des sens
Réveille le passé
Une tour symbole
Narre d’étranges aventures
Des chevaliers de métal
Cherchent un Graal inexistant
Au centre toujours vide
D’une cathédrale de feu
Les trompes héroïques
Annoncent l’aboutissement


Robert Meyrat




Visage apaisé
D’une langueur monacale
Il distille son suc
D’entre les lames
Porteur d’une idée
A jamais égarée
Dans les songes anciens

Sur la place connexe
D’une ville emblématique
Un monument exerce
Son irrépressible attention
Aux mornes souvenirs
D’une guerre dite grande
Des hommes petits
Ont dressé un mémorial

Poussée des ambitions
Face aux puissances nocturnes
Il faut à nouveau énoncer
La vérité des sages
Qui d’un commun accord
Tiennent les strates unies
L’âme toujours réinventée
Vit des instants solitaires
Entre le flux d’une rime
Et le reflux d’un concept
Penseurs aux idées larges
Voici le temps des sémaphores

                                                                                                                                         Christian Skimao

Ce poème appartient au tirage de tête de l'ouvrage Têtes aux Editions Venus d'ailleurs. Il a été publié à quatre exemplaires avec quatre photos argentiques originales de Marie-Christine Schrijen en 2014.




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